Conséquences du passage à la nouvelle formule du Lévothyrox en France
Étude de pharmaco-épidémiologie à partir des données du SNDS
En France, de l’ordre de 3 millions de personnes utilisent un produit à base de lévothyroxine.
Début 2017, la seule spécialité à base de lévothyroxine disponible sous forme de comprimés était le Lévothyrox (commercialisé par le laboratoire Merck). Fin mars 2017, une nouvelle formule du Lévothyrox (Lévothyrox NF) a été mise à disposition en remplacement de l’ancienne formule (AF).
À partir du début de l’été 2017, de nombreuses personnes utilisant la nouvelle formule du Lévothyrox se sont plaintes d’effets indésirables, donnant lieu à un très grand nombre de signalements au système de pharmacovigilance et à une importante vague de médiatisation. L’analyse fine des données de pharmacovigilance a montré un profil clinique d’effets indésirables rapportés semblable avec la nouvelle formule comparé à l’ancienne, mais avec une fréquence de signalements « totalement inattendue ». Cependant, cette analyse ne permet pas de proposer d’hypothèse pour expliquer la survenue de ces effets, et notamment de les attribuer à un éventuel problème de sécurité spécifiquement lié à la nouvelle formule du Lévothyrox.
Afin d’objectiver et quantifier un éventuel risque pour la santé spécifiquement en lien avec l’utilisation d’un produit de santé, il est nécessaire de comparer l’état de santé d’une population exposée à ce produit à celui d’une population de référence qui n’y est pas exposée, mais dont toutes les autres caractéristiques sont les plus proches possibles de celles de la population exposée. C’est cette démarche qui a été effectuée dans cette étude de pharmaco-épidémiologie, qui a consisté à comparer, à caractéristiques sociodémographiques et médicales identiques, l’état de santé des personnes exposées à la nouvelle formule du Lévothyrox en France en 2017 à celui de personnes traitées par l’ancienne formule du Lévothyrox l’année précédente.
L’étude a été réalisée à partir des données du Système National des Données de Santé (SNDS, anciennement SNIIRAM), comprenant les données nationales exhaustives de remboursement de soins de ville (DCIR) et d’hospitalisation (PMSI) de l’ensemble des individus couverts par l’Assurance Maladie en France, quel que soit le régime de sécurité sociale.
Cette étude ne met pas en évidence d’augmentation de survenue de problèmes de santé graves (décès, hospitalisations, arrêts de travail d’au moins 7 jours) ou de consommation de médicaments utilisés pour traiter des symptômes somatiques tels que ceux notifiés en pharmacovigilance (antalgiques, corticoïdes/antihistaminiques, traitements de l’hypotension orthostatique, antimigraineux, antivertigineux, antidiarrhéiques) en lien avec le passage à la nouvelle formule du Lévothyrox en France. En revanche, elle montre une nette augmentation des recours aux soins ambulatoires concentrée sur la période d’août à octobre 2017 et une hausse relative de l’utilisation de certains médicaments comme les benzodiazépines suite au passage à la nouvelle formule du Lévothyrox.
Ces résultats ne fournissent pas d’argument en faveur d’une toxicité propre de la nouvelle formule du Lévothyrox. Ils reflètent plutôt les difficultés rencontrées par certains patients lors du changement de formule, comme cela a été rapporté à travers les notifications au dispositif de pharmacovigilance ou dans l’expression publique des patients portant notamment sur le manque d’information sur le changement de formulation.
Retrouvez le rapport de l’étude sur les conséquences du passage à la nouvelle formule du Lévothyrox en France