Caractéristiques sociodémographiques des nourrissons recevant du nirsevimab
Sociodemographic Characteristics of Infants Receiving Nirsevimab
Contexte et objectif
Les inégalités de santé dans la petite enfance contribuent de manière significative à la morbidité et à la mortalité évitables dans les pays à revenu élevé.
L’infection par le virus respiratoire syncytial est une cause de morbidité et de mortalité chez les jeunes enfants et, jusqu’à l’autorisation du nirsevimab en 2022, il n’existait aucun programme de prévention universel. La première campagne de vaccination avec le nirsevimab a débuté en France en septembre 2023, avec une dose unique gratuite recommandée pour les nourrissons nés après le 6 février 2023.
Cette étude a exploré les inégalités sociodémographiques potentielles associées à l’absorption du nirsevimab au cours de cette campagne.
Méthodes
Cette étude de cohorte a inclus à partir du SNDS tous les nourrissons éligibles au nirsevimab nés entre le 6 février et le 15 septembre 2023. L’événement d’intérêt était l’administration ambulatoire d’une dose unique de nirsevimab entre le 15 septembre 2023 et le 31 janvier 2024. Cependant, en raison de pénuries nationales au cours de cette campagne initiale, seule une fraction des enfants éligibles a reçu une immunisation passive.
Nous avons comparé les caractéristiques des nourrissons vaccinés et non vaccinés, y compris les caractéristiques générales (sexe, âge gestationnel, poids et période de naissance, et type d’affiliation à la sécurité sociale), les indicateurs socio-économiques individuels (type d’hôpital de naissance, statut d’assurance maladie complémentaire de solidarité, et consultations dans les centres de protection maternelle et infantile), et les indicateurs d’inégalités sociogéographiques (région de résidence, indicateurs de privation liés à la municipalité résidentielle [Indice de privation français], et accessibilité aux soins de santé [accessibilité potentielle localisée des médecins généralistes]).
Résultats
Sur les 328 131 nourrissons de l’étude, 42 082 (12,8 %) ont reçu du nirsevimab (âge moyen au moment de l’administration, 4,8 [2,3] mois). Les nourrissons de sexe masculin (aOR vs féminin, 1,07 [IC 95 %, 1,05-1,10]), nés très prématurément (aOR vs à terme, 2,07 [IC 95 %, 1,82-2,37]) et en juin ou juillet (aOR vs février ou mars, 1,69 [IC 95 %, 1,64-1,74]) étaient plus susceptibles d’être vaccinés.
Les indicateurs socio-économiques étaient associés à la vaccination par le nirsevimab. Au niveau individuel, les nourrissons dont les parents bénéficiaient d’une assurance maladie complémentaire solidaire (aOR, 0,38 [IC 95 %, 0,37-0,39]), étaient couverts par le régime de sécurité sociale agricole (aOR par rapport au régime général, 0,86 [IC 95 %, 0,79-0,93]) et bénéficiaient de consultations dans des centres de protection maternelle et infantile (aOR, 0,78 [IC 95 %, 0. 75-0.82]) et les nourrissons nés dans des hôpitaux publics (aOR, 0.81 [95% CI, 0.79-0.83]), vivant dans les municipalités les plus défavorisées (quartile 5 [Q5] vs Q1 : aOR, 0.41 [95% CI, 0.39-0.42]), ou ayant une plus faible accessibilité aux médecins généralistes (Q1 vs Q5 : aOR, 0.60 [95% CI, 0.57-0.62]) avaient des chances significativement plus faibles d’être vaccinés. Nous avons également observé des disparités régionales, avec une couverture vaccinale plus élevée dans le nord de la France.
Conclusion
Cette étude de cohorte a révélé d’importantes disparités socio-économiques et géographiques dans les taux de vaccination par le nirsevimab au cours de la première campagne de vaccination ambulatoire gratuite en France. Les nourrissons nés en juin ou juillet 2023 présentaient des taux de vaccination plus élevés, probablement en raison de recommandations opportunes et d’une sensibilisation accrue des parents à leur risque. Des disparités ont été observées chez les nourrissons défavorisés sur le plan socio-économique et ceux résidant dans des zones où l’accès aux soins de santé est limité. Les disparités géographiques peuvent par ailleurs avoir été exacerbées par des pénuries d’approvisionnement, qui ont eu un impact disproportionné sur les régions les plus défavorisées.
Retrouvez l’article sur le site de JAMA Network Open