Le 24 janvier 2024

Vaccins COVID‑19 et saignements menstruels abondants

Risque de saignements menstruels abondants ayant nécessité une prise en charge à l’hôpital au décours de la vaccination contre le COVID-19 : étude cas-témoins à partir du système national des données de santé (SNDS)

Introduction

Des cas de troubles menstruels, en particulier de saignements menstruels anormalement abondants, ont été signalés auprès du système de pharmacovigilance suite à la vaccination contre le COVID-19. A ce jour, peu d’études épidémiologiques ont permis de bien caractériser ce risque.

 

Objectif

L’objectif de cette étude était d’évaluer le risque de saignements menstruels abondants au décours de la vaccination contre le COVID-19 en France. Plus précisément, il s’agissait de quantifier l’association entre la vaccination contre le COVID-19 et la survenue de saignements menstruels abondants ayant fait l’objet d’une prise en charge à l’hôpital.

 

Méthodes

Toutes les femmes de 15-50 ans ayant eu un diagnostic de saignements menstruels abondants à l’hôpital (hospitalisation de jour ou avec hébergement de nuit) entre le 12 mai 2021 et le 31 août 2022 ont été identifiées dans le Système National des Données de Santé (SNDS). Chacun de ces cas a été apparié aléatoirement à jusqu’à 30 femmes n’ayant pas été hospitalisées pour un problème de saignement génital anormal et ayant les mêmes caractéristiques en termes d’âge, de département de domicile, d’indice de défavorisation sociale de la commune de résidence, et de méthode contraceptive.
La date index, pour les cas comme pour leurs témoins, était la date d’hospitalisation du cas. Nous avons exclu les femmes qui, à la date index, avaient eu un début de grossesse dans les 18 mois précédents ou une hystérectomie ou un trouble de la coagulation dans les cinq ans précédents. L’exposition était définie par le nombre de doses reçues et la durée depuis la dernière dose de vaccin administrée. Des modèles de régression logistique conditionnelle ajustés sur les comorbidités, les caractéristiques sociodémographiques et de recours aux soins, et un diagnostic d’infection par le SARS-CoV-2 dans les 2 mois précédents ont permis d’estimer les associations entre le statut vaccinal et la survenue de saignements menstruels abondants ayant nécessité une prise en charge à l’hôpital.

 

Résultats

Au total, 4 610 femmes âgées en moyenne de 39,3 ans (écart-type : 9,0 ans) prises en charge à l’hôpital pour des saignements menstruels abondants en France entre le 12 mai 2021 et le 31 août 2022 (les cas) et 89 375 témoins ont été inclus. Le séjour hospitalier des cas s’est le plus souvent déroulé en hôpital de jour (70,8% pour les non vaccinées et 78,3% pour les vaccinées) ; pendant le séjour, respectivement 8,1% et 3,8% ont reçu une transfusion sanguine. Deux femmes sont décédées dans les 30 jours suivant leur admission à l’hôpital (l’une non vaccinée et l’autre vaccinée). Comparées aux témoins, les cas avaient plus souvent été hospitalisés (tous motifs confondus, hors obstétrique) en 2018 ou 2019 (30,8% versus 18,3%) et avaient davantage de comorbidités. A la date index, 28,8% des cas et 29,7% des témoins n’étaient pas vaccinés.
Les femmes prises en charge à l’hôpital pour des saignements menstruels abondants avaient plus souvent reçu leur dernière dose de vaccin dans les 1 à 3 mois précédents (Odds-Ratio (OR) ajusté et intervalle de confiance à 95% : 1,15 [1,04 ; 1,28]). Cette association était observée pour les doses de primovaccination (OR 1,20 [1,07 ; 1,35]), mais non retrouvée pour les doses de rappel (OR 1,07 [0,92 ; 1,26]). Elle concernait plus particulièrement les femmes résidant dans des communes défavorisées socialement (OR 1,28 [1,07 ; 1,52]) et les femmes n’utilisant pas de contraception hormonale (OR 1,28 [1,11 ; 1,48]). En faisant l’hypothèse d’une relation causale, le nombre estimé de cas attribuables à la primovaccination était de 8 cas [4 ; 15] par million de femmes vaccinées, soit un nombre total de 103 cas [54 ; 196] parmi l’ensemble des femmes de 15-50 ans ayant été vaccinées en France entre le 12 mai 2021 et le 31 août 2022.
Le risque de saignements menstruels abondants ayant nécessité une prise en charge à l’hôpital ne différait pas entre les femmes non vaccinées et celles ayant reçu leur dernière dose de vaccin depuis moins d’1 mois ou plus de 3 mois, avec des OR compris entre 0,93 et 1,11.

 

Conclusion

Cette étude fournit de nouveaux arguments en faveur de l’existence d’un risque augmenté de saignements menstruels abondants au décours de la vaccination contre le COVID-19 par vaccin à ARNm. La période des 1-3 mois suivant la primovaccination apparaît comme seule concernée par ce risque, même si on ne peut exclure qu’il survienne plus tôt compte tenu du délai probable entre les premiers symptômes et la prise en charge à l’hôpital. Cette augmentation de risque se serait traduite par environ 100 cas pris en charge à l’hôpital en France entre mai 2021 et août 2022, période durant laquelle la majorité des femmes a été vaccinée. En revanche, les résultats ne suggèrent pas d’augmentation du risque de saignements menstruels abondants au décours des doses de rappel.

Rapport

Risque de saignements menstruels abondants ayant nécessité une prise en charge à l’hôpital au décours de la vaccination contre le COVID-19 : étude cas-témoins à partir du système national des données de santé (SNDS)

Article

Botton, J. et al. (2024), Vaccine